Dans une étude sur les gisements d’obsidiennes, Laurent Jacques Costa montre qu’à l’ouest de la Méditerranée, la navigation en mer est prouvée dès la fin du VIe millénaire avant J.-C. En effet, dès cette date, les obsidiennes de Lipari et de Sardaigne se retrouvent sur le continent.
Vers l’est de la mer Méditerranée, ce savoir-faire apparaît sur toute la durée de l’histoire des pharaons d’Égypte. En voici les plus importantes représentations durant les principaux empires.
Kenamon était surintendant des greniers d’Amon, probablement sous le règne d’Amenhotep III. Des navires, dont les fresques sont maintenant complètement détruites, sont représentés dans sa tombe. Ils ne sont plus connus que par des photographies réalisées en 1895 par G. Daressy, complétées par des dessins exécutés au cours de l’hiver 1922-1923 par N. de G. Davies. Les bateaux apparaissent tous du même type. Ils ne se manœuvrent pas à la rame mais uniquement à la voile : la claie empêchait l’emploi d’avirons. Aucun câble de tension n’est visible. La voile est tendue entre deux vergues d’une seule pièce et c’est celle du bas qu’on élève en hauteur, deux énormes jarres sont attachées à chaque extrémité, elles-mêmes très relevées. L’aspect vestimentaire des personnages donne clairement à l’équipage une origine syrienne.
http://marine.antique.free.fr/navegpe03.php
C’est de cette même époque que date l’épave d’Uluburun, à l’ouest de la péninsule anatolienne. Il s’agit du plus ancien navire de transport de marchandises jamais découvert, vers les environs de Kas.
http://archeologiesubaquatique.wordpress.com/2012/03/06/lepave-dulu-burun-une-fouille-exemplaire/
Quelques années auparavant avait eu lieu l’expédition d’Hatshepsout vers le pays de Pount. S’il est incontestable que certaines scènes du temple évoquent une région où poussent les arbres à encens. Les textes associés la désignent plus sous le vocable « Les Échelles de l’Encens » que sous le nom de Pount. Des navires ont été représentés sur ces murs de son temple à Deir El-Bahari. Leur longueur est de l’ordre de vingt mètres. La coque est étroite, basse, relevée et amincie aux deux bouts, pontée d’une extrémité à l’autre, et percée sur chaque flanc, au niveau du pont, de seize écoutilles. Pour mieux résister aux coups de mer, les éléments sont consolidés par un appareil bizarre : un câble énorme qui s’élève obliquement à deux mètres au-dessus du pont. Le parcours emprunté par les bateaux ne fait pas l’unanimité.
http://egypte.nikopol.free.fr/Temples/deirelbahari.html
Des expéditions maritimes sont également connues durant la XIe dynastie. Des ingénieurs et des soldats allaient chercher des blocs de pierre pour les constructions. Il s’agissait de traditions de l’Ancien Empire. Le dernier des Pharaons de la XIe dynastie s’appuya sur un grand personnage du nom de Honnou qui allait s’approvisionner dans la vallée de Rohonnou.
Récemment, à Abydos, 120 graffitis de navires ont été trouvés dans une fosse non loin de la pyramide de Sésostris III :
https://nicolas-constans.net/2016-11-26-le-bateau-du-pharaon-et-les-120-dessins/
Sahouré, le second souverain de la Ve dynastie, qui a régné vers 2 450 avant J.-C, a apporté la suzeraineté de l’Égypte sur Byblos en épousant une princesse phénicienne. Des scènes de son temple funéraire, trouvées par Ludwig Borchardt, présentent des navires transportant un chargement de cèdres du Liban. Il aurait également organisé une expédition vers le pays de Pount, fait qu’il relate dans son temple funéraire à Abousir et qui vient compléter les découvertes précédentes. Des scènes inédites représentent le retour de navires de haute mer, chargés des biens précieux rapportés depuis cette lointaine contrée.
http://labalancedes2terres.free.fr/spip.php?article498
Mais des navires équipés pour les traversées maritimes devaient être utilisés dès le début de l’Ancien Empire : le bateau solaire de Kheops, retrouvé devant sa pyramide de Gizeh, en est un exemple. Le vaisseau, en bois de cèdre, à bordage cousu, mesure 43,5 mètres de long. Sa proue s’élève à 5 mètres et sa poupe à 7 mètres. Si c’est un élément de culte funéraire, il est évident qu’il a été construit en utilisant des techniques alors maîtrisées par les Égyptiens. Selon les dernières études, le voilier est théoriquement capable de remonter au vent, et de naviguer en haute mer. La démonstration grandeur nature n’a pas été faite. Il a été découvert en 1954, muni de tout son outillage : rames, cordes et cabine. Il comprenait 1224 pièces détachées. Remonté, il est actuellement exposé dans le musée situé exactement à l’endroit où le navire a été trouvé.

Vue de la barque solaire reconstituée de Kheops
Sur cinq fosses de barques solaires, seules deux d’entre elles contenaient encore un bateau en bois.
http://www.lepoint.fr/actu-science/une-deuxieme-barque-solaire-a-kheops-22-06-2011-1344862_59.php
Mais les plus anciennes traces de navigation égyptiennes apparaissent sur les dessins rupestres du désert de l’Est. Des bateaux à hautes proues, aptes à la navigation sur mer, y sont représentés ! Les experts s’accordent maintenant pour dire que ces pétroglyphes datent des périodes prédynastiques.
En conclusion, durant toute l’histoire des pharaons, et même avant, pendant la période prédynastique autour de la mer Méditerranée des hommes ont su construire des embarcations capables d’affronter les voyages en mer.